Optimiser sa productivité, s’organiser pour réaliser un maximum de tâches dans la journée, éliminer les distractions, prévoir des plages horaires délimitées pour se détendre, mettre à profit des outils de productivité… Voilà autant de conseils et d’objectifs que nous croisons très souvent, surtout dans l’entrepreneuriat. Et si, pour améliorer sa productivité d’entrepreneur ou de salarié, il fallait, au contraire, redonner à la sieste et à nos besoins plus de place dans nos journées ? Pour nous éclairer sur ce sujet, j’ai invité Manuel, « influenceur sieste ». Nous avons parlé (entre autres !) de sa vision plus douce et bienveillante de la productivité, d’astuces simples et actionnables dès maintenant, de l’origine de cette place si prépondérante du travail dans nos vies…
Définition de la productivité selon Manuel
La productivité, l’art de la paresse
Avec Manuel, on avait envie d’aborder la productivité sous un angle peu commun. La définition de la productivité que nous vous proposons ici est bien différente de celles que vous aurez probablement entendue jusqu’ici, qu’il s’agisse de la productivité d’un entrepreneur ou de la productivité en entreprise au sens large.
Mais assez de suspens, rentrons dans le vif du sujet ! Voici la définition de la productivité donnée par Manuel au micro de « Ça suffit les c*nneries ! » :
« J’ai tendance à penser que, finalement, la productivité, c’est l’art de la paresse. C’est l’art de la glande. Être productif, finalement, c’est chercher à obtenir un maximum de résultats avec un minimum d’effort. »
Manuel Carroué
Et qui est Manuel pour affirmer cela ? 😊
« Je suis formateur, consultant en organisation, gestion du temps et, globalement, tout ce qui touche à la productivité personnelle. Effectivement, j’aime bien mettre l’accent sur la sieste parce que c’est un petit peu, finalement, ma vision de la productivité, qui ne consiste pas forcément à en faire toujours plus, mais à mettre en place une productivité qui convient à son propre rythme et qui permet de s’écouter, soi. »
Manuel Carroué
Pour en arriver là, Manuel a tout simplement cherché à améliorer sa productivité lorsqu’il était étudiant en droit. Il est tombé sur les conseils habituels, suggérant, par exemple, de se lever tôt, de supprimer les distractions « inutiles »… Et il a constaté que ça ne fonctionnait pas. Au contraire, sa productivité baissait.
« Je me suis dit : « Ba écoute, ça ne fonctionne pas pour moi. Et puis ce sont des conseils un petit peu à côté de la plaque, en fait, je trouve, parce que moi, j’ai aussi envie de profiter de la vie. Si j’essaie d’être plus productif, c’est, au contraire, pour avoir plus de temps libre, pas pour en avoir moins ». »
Manuel Carroué
L’avis de Manuel sur les outils de productivité souvent plébiscités
Une fois qu’on décide d’aborder sa productivité d’entrepreneur sous cet angle, on se pose vite la question de l’utilité des outils traditionnellement plébiscités. Tu as sans doute déjà entendu parler, par exemple, de la méthode Pomodoro.
« Les outils, ce ne sont que ça : ce sont des outils. Il y a des outils qui vont fonctionner pour certaines personnes, qui vont fonctionner dans certains contextes. Mais ce n’est pas pour ça qu’ils vont fonctionner pour tout le monde, dans tous les contextes. L’idée, c’est savoir quels sont mes besoins et d’identifier le bon outil, qui va m’aider à résoudre mon problème et à avancer. Et pour ça, la meilleure chose à faire, c’est d’essayer les différents outils. »
Manuel Carroué
Bien sûr, ces outils peuvent t’aider à améliorer ta productivité d’entrepreneur. Mais attention :
- ils ne sont pas non plus la solution miracle ;
- il y en a qui te conviendront et d’autres non ;
- il faut quand même faire attention à la façon dont tu t’en sers.
S’ils sont utilisés dans le but de caser le maximum de tâches dans ta journée de travail, l’avis de Manuel et de moi-même, c’est qu’en fait, ils t’éloigneront d’une productivité optimale.
Lien entre organisation et liberté
La productivité est une question centrale pour toute personne qui travaille, que ce soit en tant qu’entrepreneur ou au sein d’une entreprise, en tant que salarié. Toutefois, les entrepreneurs, et notamment les « solopreneurs », l’abordent avec un angle bien précis.
En effet, beaucoup d’entre eux, d’entre nous, se sont mis à leur compte notamment dans le but d’être maître de leur emploi du temps. Par conséquent, l’idée d’organiser ses semaines et ses journées, de mettre en place des process pour améliorer leur productivité d’entrepreneur, ça peut donner l’impression de se priver de la liberté à laquelle ils aspirent.
À ceux-là, Manuel répond que, par expérience, il a remarqué que, souvent, ceux qui disent qu’ils travaillent « quand ils veulent et où ils veulent », en fait, ils travaillent tout le temps et partout… C’est donc une notion de liberté toute relative.
Dans le fond, ce que recherchent la plupart des entrepreneurs, ce n’est pas la liberté absolue, c’est la liberté de pouvoir fixer ses propres règles. Justement, cela n’est aucunement incompatible avec la mise en place d’une certaine organisation ! Vous pouvez planifier vos semaines pour améliorer votre productivité d’entrepreneur, mais quand même décider de ne travailler que le matin, dans la limite de tant d’heures par jour, sur tel et tel jour de la semaine uniquement… Bref, de travailler comme vous le souhaitez. 😊
Conseils pour améliorer sa productivité d’entrepreneur
Quoi mettre en place en priorité ?
Le cadre est maintenant posé. Tu sais désormais de quoi il s’agit précisément quand on parle de productivité de l’entrepreneur dans cet article. Tu as compris aussi que les outils à utiliser et règles à mettre en place dépendent de chacun ! Toutefois, j’ai demandé à Manuel s’il avait des conseils privilégiés à donner.
Les voici :
- réaliser un audit de son temps (pour voir concrètement combien de temps on travaille) ;
- réfléchir à sa journée idéale (pour savoir vers quoi on souhaite tendre) ;
- planifier ses journées la veille (pour ne pas y penser le soir au coucher et être serein·e dès le lever) ;
- faire chaque jour une sieste d’environ 20 minutes (pour avoir un boost d’énergie dans l’après-midi, au lieu d’un coup de barre) ;
- mettre son téléphone en silencieux pendant au moins un créneau (1 h/1 h 30) chaque jour (pour être concentré à 100 % sur ce créneau, sans interruption impromptue).
« C’est intéressant, parce que du coup, en termes d’outils, ce sont vraiment des choses… faciles. […] Finalement, ce sont des choses qu’on peut mettre en place tout de suite, qui ne coûtent rien et qui peuvent être actionnables vraiment maintenant. »
Priscilla
C’est la double bonne nouvelle de cet épisode de podcast sur la productivité de l’entrepreneur :
- non seulement nous t’encourageons à la voir comme l’art de la paresse ;
- mais en plus, elle ne demande pas d’application à télécharger, ni de routine complexe à mettre en place.
« Dès qu’on commence à mettre en place une routine un petit peu plus complexe… on tient 3 jours. Au bout de 3 jours, on la laisse tomber, justement parce que c’est trop complexe. Plus c’est simple à mettre en place et plus on a de chance de tenir dans le temps. »
Manuel Carroué
Quels signaux d’alerte surveiller ?
Ceci étant… peut-être que toi qui nous lis, tu ne sais plus trop si tu as besoin ou non d’améliorer ta productivité. Nous avons échangé sur ce point aussi. Évidemment, il existe des signaux d’alerte qui nous sont propres. Toutefois, il en existe aussi qui sont courants et assez universels :
- sacrifier ses soirées, week-ends, vacances ;
- culpabiliser de s’arrêter de travailler ;
- avoir l’impression d’être constamment débordé·e ;
- être tout le temps fatigué·e ;
- procrastiner beaucoup de choses…
Quand s’interroger sur sa productivité, en tant qu’entrepreneur ?
Nous t’encourageons à observer ses signaux et à questionner ta productivité d’entrepreneur même si tu as l’impression que tu n’en as pas besoin. Le risque, c’est de se rendre compte tard qu’on s’est épuisé·e.
« Moi, [les personnes que j’accompagne] ça va être beaucoup d’entrepreneurs qui travaillent en solo, parce que ce sont eux qui souffrent le plus, finalement, d’un manque d’organisation. Quand t’es solo, tu te dis : « c’est super, je peux travailler quand je veux »… et puis, finalement, tu te retrouves à travailler tout le temps. Ce sont ceux qui souffrent le plus d’un manque de cadre. »
Manuel Carroué
Manuel nous confie qu’il a des clients qui viennent le voir en amont, avant que la santé n’en pâtisse. Mais, malheureusement, beaucoup le consultent quand ils sont déjà sur la pente glissante, voire quand c’est un peu trop tard et qu’ils ont un pied dans le burn-out.
Le manque de douceur de la société face à la paresse
La place trop importante du travail dans notre société
Tu l’auras compris : Manuel nous a prodigué tout un tas de précieux conseils pour améliorer ta productivité d’entrepreneur. Nous avons aussi échangé sur les causes de cette vision stressante de la productivité que véhicule notre société. Dès l’école, on nous apprend qu’il faut travailler dur, que la paresse est négative et même, plus largement, que le repos et les temps de loisirs sont à limiter.
Cette vision des choses héritée de la religion et du capitalisme (Manuel nous en dit plus sur cette origine dans l’épisode !) complique la mise en place d’une productivité basée sur l’écoute de ses besoins et sur une sieste quotidienne… Le regard des autres peut vite peser. Elle nous incite aussi à associer plus ou moins consciemment notre valeur et notre utilité à la quantité de travail que nous abattons.
Cette place trop importante accordée au travail dans notre société peut se constater de plein de façons différentes. Le nombre restreint de personnes qui prônent la sieste comme outil pour améliorer la productivité de l’entrepreneur en est une.Mais ce n’est pas le seul !
« Quand un parent explique qu’il veut passer plus de temps avec ses enfants […], on dit qu’il sacrifie sa carrière. C’est-à-dire que passer du temps avec sa famille, c’est sacrifier sa carrière. Mais passer beaucoup de temps au boulot, ne pas voir ses enfants et sacrifier sa famille, on dit que « oh la vache, il est courageux, il a de l’ambition ». Tout ça, ce sont plein de petits indices qui moi, me font dire qu’on travaille beaucoup trop, dans le sens où le travail occupe une place beaucoup trop importante dans nos vies et ça en devient malsain. »
Manuel Carroué
L’hypocrisie des entreprises face au bien-être au travail
Ceci étant, il faut reconnaître que, malgré tout, on entend de plus en plus parler de bien-être au travail. C’est une bonne chose ! Cependant, Manuel tient à ce sujet un discours intéressant.
« Je trouve même qu’il y a un côté un petit peu hypocrite dans la façon dont les entreprises en général voient tout ce qui est bien-être au travail. C’est parce qu’on se rend compte qu’un salarié heureux, on va dire, un salarié qui est bien, qui est en bonne santé, qui est heureux, c’est un salarié qui est plus productif. C’est vraiment juste : on va faire en sorte d’améliorer ton bien-être au travail pour que tu sois plus productif. Et moi, je suis persuadé que si demain, on trouve des études qui démontrent que les salariés stressés sont plus efficaces, je peux t’assurer que toutes les entreprises vont faire en sorte de stresser les salariés, pour qu’ils soient plus productifs. »
Manuel Carroué
Nous avons, là encore, un exemple qui montre bien que notre rapport au travail n’est pas sain et que, par conséquent, nous cherchons souvent à améliorer notre productivité d’une façon biaisée.
Les différences entre générations face au travail
Pour terminer, j’ai souhaité savoir si Manuel observe des différences entre les générations sur cette question de la productivité. Bonne nouvelle : la réponse est oui ! On nous a beaucoup vendu qu’il faut travailler dur à l’école, puis travailler dur en entreprise pour pouvoir ensuite profiter de la retraite… Mais nous remarquons bien que ce deal est biaisé. Une fois la retraite arrivée, beaucoup ne peuvent pas en profiter. Parmi les jeunes générations, le rapport au travail a donc tendance à être différent de celui des autres générations. Ainsi, la semaine de 4 jours ou le télétravail sont de plus en plus des leviers de négociation, des conditions sine qua non pour signer un contrat.
Et tant mieux ! Il est grand temps de réaliser qu’on peut avoir de l’ambition et des projets sans pour autant y laisser sa santé et sans accepter de se priver de bons moments.
*
Si tu t’interrogeais sur les meilleurs outils pour améliorer ta productivité d’entrepreneur (Ou de salarié ! Ou de parent ! Ou autre ! 😉), j’espère que tu repars avec une vision plus douce et bienveillante du sujet. Pour passer à l’action, je t’encourage vivement à écouter l’épisode en entier. Tu récupéreras ainsi la totalité des conseils de Manuel. Nous avons notamment passé un certain temps à échanger sur ce qu’il est possible de mettre en place simplement et dès maintenant. Pour aller plus loin, tu peux :
- retrouver Manuel sur son site internet, Cataraxie, sur Linkedin ou sur son compte Instagram, @cataraxie ;
- donner ton avis sur cet épisode et rejoindre la communauté CSC sur Instagram ou LinkedIn !
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